Le bulletin d’Épidémiosurveillance en Santé Végétale est une revue des actualités concernant la santé du végétal en Europe et à l’International. Il contribue à faciliter l’accès aux informations concernant la santé des végétaux et leur diffusion. Le bulletin est validé au préalable par une cellule éditoriale composée d'experts scientifiques et de collaborateurs partenaires ayant un rôle de conseillers.



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Sommaire

Sujet phytosanitaire Zone géographique Cultures Nature de l'information
Généralités Monde / Revue scientifique - Méthodes pour améliorer la surveillance
ToBRFV Belgique Tomates Notifications de nouveaux cas [mise à jour]
Spodoptera frugiperda Syrie Multi-espèces Evaluation de l'état sanitaire, Notifications de nouveaux cas
Spodoptera frugiperda Australie Multi-espèces Evaluation de l'état sanitaire, Notifications de nouveaux cas
Xylella fastidiosa France Multi-espèces Evaluation de l'état sanitaire, Notifications de nouveaux cas


Références des articles traités dans ce bulletin selon les organismes nuisibles et l'échelle spatiale


monde MONDE
Généralités
lien


pays PAYS



Généralités


Monde / Revue scientifique - Méthodes pour améliorer la surveillance

Le contexte de mondialisation du commerce international des plantes engendre de nouvelles problématiques phytosanitaires liées à l’introduction d’organismes nuisibles (ON) dans des zones géographiques saines. C’est pourquoi, il est important de fournir aux gestionnaires du risque des systèmes de classement des ON basés sur le risque qu’ils représentent pour la santé des plantes. L’EFSA a récemment produit un rapport qui fait un état des lieux des systèmes de classement mis au point et utilisés par une partie des états membres de l’Union Européenne (UE) et élargissant la réflexion aux systèmes adoptés par certains pays tiers.

En France, les outils de classement ont été produits par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses). Ceux des autres pays ont été réalisés par des organismes équivalents. En tout, ce sont sept modèles de classement qui ont été évalués et comparés entre eux : Moignot and Reynaud (2013) (M&R) et Biological Organisms Data Retrieval and Ranking System (BioR2) (Tayeh et al., 2017 et Tayeh et al., 2020) pour la France, Plant Health Risk Register (PHRR) (Baker et al., 2014) pour le Royaume-Uni, Harmonia+ and Pandora+ (H+/P+) (D’hondt et al., 2015) pour la Belgique, FinnPRIO (Heikkilä et al., 2016) pour la Finlande, le schéma NVWA (NVWAs) (van der Gaag, 2017) pour les Pays-Bas et le système ERIN (ERIN) (Wendell, 2016) pour la Norvège. Cette évaluation comparative a été réalisée en considérant six grands thèmes : (1) l’objectif du classement, (2) les caractéristiques des ON ciblés, (3) les modèles et les caractéristiques de l’outil, (4) le système de notation et le calcul des scores, (5) le traitement des données manquantes, de l’incertitude et du processus de validation, (6) l’intégration ou non de différents scénarios et de coefficients de pondération. Les points saillants d’analyse sont présentés ci-après pour chacun de ces six thèmes :

  1. L’ensemble des systèmes ont pour objectif de prioriser l’allocation des ressources publiques. Hormis l’outil NVWAs (où seule la probabilité d'introduction est considérée dans le document de référence), ils prennent tous en compte l’ensemble des étapes de l’analyse de risque phytosanitaire : risque d’entrée, d’établissement, de dissémination et l’impact potentiel de l’installation de l’ON. L’ensemble des outils ont été construits en prenant en compte une région donnée. Ainsi, des ajustements seront nécessaires pour une utilisation à une autre région. Il est à noter que BioR2 est l’un des outils les plus simples à adapter à une zone géographique spécifique.
  2. Tous les outils sont suffisamment génériques pour permettre de classer un large éventail d'organismes (champignons, nématodes, insectes, bactéries et virus) et ils ciblent tous les organismes nuisibles réglementés par la Commission Européenne.
  3. Les modèles de classement sont de deux types: certains reposent sur des bases de données avec une interface graphique web (BiOR², H+/P+) et d’autres reposent sur des feuilles de calcul. L’utilisation du second type de modèle est facilitée pour des non-spécialistes, mais elle n’est pas sans risque en termes d’erreurs de saisie des données. L’utilisation de bases de données en entrée des calculs est recommandée car ces dernières permettent de garantir l'indépendance et l'intégrité des données collectées, ainsi que leur pérennité. Cependant, leur développement nécessite des compétences en programmation informatique. Contrairement à l’outil BiOR² pour lequel l'acquisition des données est séparée de l'analyse de risques, les autres outils réalisent les deux étapes simultanément.
  4. Le nombre de critères et/ou de questions intégrées à l’outil influence les résultats : plus le nombre de critères est élevé, plus le classement est précis et discriminant. Cependant, le temps nécessaire pour classer chaque ON est plus important. La notation semi-quantitative qui permet de traduire des informations qualitatives en données quantitatives est appliquée dans la plupart des modèles. Seul le modèle BiOR² applique des critères quantitatifs et qualitatifs distincts mesurés à des échelles différentes. Une fois que le score final (qui reflète la dangerosité de l’ON) est calculé, il ne varie plus dans la plupart des modèles. Dans le modèle BiOR², une méthode de surclassement est utilisée pour comparer les ON deux à deux ce qui permet un classement relatif des ON, du plus risqué au moins risqué. Le classement relatif ainsi obtenu peut être utilisé directement par les évaluateurs des risques qui ne sont pas nécessairement des experts.
  5. Certains modèles prennent en compte des avis d'experts, une étape qui semble incontournable pour obtenir un classement robuste. Le recueil des avis d’experts doit respecter certaines règles telles qu’une transparence et une structuration à travers l’utilisation d’un "guide utilisateur" par exemple.
  6. Le rapport souligne aussi l’importance de la flexibilité de l’outil notamment pour permettre au gestionnaire de risques d’influencer le classement en pondérant certains critères. La plupart des outils permettent de tester différents scénarios et/ou d’utiliser des coefficients de pondération qui permettent de hiérarchiser plus facilement les différents facteurs. Néanmoins, une autre revue scientifique récente de MacLeod & Lloyd (2020) souligne le fait que cela ajoute une part de subjectivité aux systèmes de classement.

Même si tous les outils européens évalués dans ce rapport présentent des objectifs et des approches similaires, aucune norme commune n’est apparue. Pourtant, il existe des modèles basés sur le risque qui ont été utilisés par différents pays. C’est en élargissant les recherches bibliographiques au niveau des pays tiers de l’UE et plus globalement au niveau mondial, que certaines normes se dégagent, en particulier dans le domaine des plantes invasives. On peut citer par exemple le modèle « Weed Risk Assessment model » (WRA, Koop et al., 2012) adapté des États-Unis. D’autre-part, il peut être intéressant d’intégrer des données de prédiction dans les systèmes de classement. Les cartes auto-organisées (« SOM ») font partie des modèles prédictifs les plus connus et pourraient être utilisées pour identifier et classer les organismes potentiellement envahissants en fonction de leur probabilité d'établissement dans un pays donné. Cependant, ces modèles dépendent fortement de la qualité des données d'entrée.

D’après MacLeod & Lloyd (2020), une méthode de classement basée sur des analyses détaillées des risques serait préférable. Mais cela n’est pas toujours possible lorsqu’il s’agit d’un ON nouveau pour lequel peu d’informations sont disponibles dans la littérature. Le rapport de l’EFSA souligne l’importance de développer des modèles qui permettent de générer des classements pertinents malgré le manque d'informations et recommande l’utilisation de méthodes « MCDA » (pour multiple-criteria decision analysis). Pour finir, il faut garder à l'esprit qu'une méthode de classement doit permettre une exploitation rapide et aisée par le gestionnaire de risques. L’analyse de MacLeod & Lloyd (2020) souligne d’ailleurs la différence entre les moyens nécessaires pour faire une analyse détaillée et le niveau d’information attendu par les décideurs, qui est parfois plus faible. Il serait intéressant également de développer des outils à une échelle régionale au sein des pays, ou qui ciblerait des ON non-réglementés. Pour cela, le rapport de l’EFSA et la revue de MacLeod & Lloyd (2020) évoquent la possibilité d’intégrer des ON nouvellement identifiés par les médias, par exemple en utilisant des outils de veille.

Sources : Lien1 et Lien2

ToBRFV


Belgique / Tomates / Notifications de nouveaux cas [Mise à jour]

Nous avions notifié la présence du ToBRFV en Belgique lors de notre précédent BBM (BBM n°21) sans information plus précise sur la localisation. Cette information ayant été divulguée dans la presse la semaine suivante, vous trouverez ci-dessous la carte mise à jour.

Sources : Lien1 et Lien2

Figure 1 : Carte des dernières notifications du ToBRFV aux Pays-Bas, en Espagne et en Belgique (mise à jour).

Spodoptera frugiperda


Syrie et Australie / Multi-espèces / Evaluation de l'état sanitaire, Notifications de nouveaux cas

Spodoptera frugiperda ou la légionnaire d’automne, originaire des régions tropicales et subtropicales des Amériques, est un organisme de quarantaine prioritaire dans l’Union Européenne, qui est polyphage et cause des dommages sur Poaceae (maïs, sorgho, riz, …) mais aussi sur Brassicaceae, Cucurbitaceae, Solanaceae et d’autres plantes hôtes. Ce lépidoptère est aujourd’hui présent dans plus d’une centaine de pays à travers le monde. "Il s’agit d’une espèce migratoire régulière dans les Amériques, qui se disperse du Sud au Nord des États-Unis et vole jusqu’au sud du Canada pratiquement tous les étés" (d’après la Fiche SORE). En Europe, seules des interceptions de larves ont été détectées jusqu’à présent. Ces larves sont généralement transportées via le fret aérien de produits végétaux en provenance du continent africain où le ravageur est présent depuis 2016, à l’exception de la majorité des pays du Maghreb qui demeurent indemnes. En Algérie, le dispositif de surveillance, avec l’utilisation de pièges mis en place pour la période 2020-2021, n’a pas relevé la présence du ravageur (BHV-SV 2021/06). Si jusqu’à présent, S. frugiperda a pu être intercepté aux passages douaniers, son établissement un jour prochain sur le continent européen est quasi certain (voir Zacarias, 2020 et la figure ci-dessous). Par ailleurs, le papillon est déjà présent dans les territoires ultra-marins français: La Réunion (depuis 2018), Mayotte (depuis 2018) et les Antilles françaises (depuis 1990) (OEPP).

Récemment, le ravageur a été détecté pour la première fois en Syrie (ville de Tafas) sur des plants de maïs (Zea mays). Il est probable que l’introduction de S. frugiperda en Syrie résulte d’une propagation naturelle (par vol actif et par les courants éoliens) depuis la Jordanie qui borde la Syrie dans la partie sud où le ravageur a été trouvé en novembre 2020 (Heinoun et al., 2021). Le ministère de l'agriculture syrien a prévu de mettre en place des procédures phytosanitaires et des mesures visant à limiter la propagation de la légionnaire d'automne. L'utilisation de pièges à phéromones dans les zones agricoles et dans les passages frontaliers de quarantaine sera également encouragée.

A près de 12 000 km de la Syrie, en Australie, S. frugiperda a été trouvé pour la première fois en janvier 2020 dans les îles du détroit de Torres et a depuis été retrouvé dans différentes régions australiennes (le Queensland, le Territoire du Nord, la Nouvelle-Galles du Sud, l'Australie occidentale). Un an après la première introduction du ravageur sur le territoire australien, grâce au réseau de piégeage et de surveillance mis en place, le ravageur a pu être détecté récemment par des producteurs dans deux nouvelles localités : à Orbost (Victoria) sur culture de maïs et près de Gingin (Queensland) sur culture horticole. Le Comité consultatif sur les organismes nuisibles aux végétaux australien a conclu qu'il n'était plus possible d'éradiquer S. frugiperda d'Australie. Le ministère maintient les réseaux de piégeage et la surveillance sur le terrain y compris pour détecter la présence d'œufs ou de larves afin de confirmer l'établissement de l’organisme dans de nouvelles localités, mais également de fournir un avis d'alerte rapide au secteur agricole/industriel lorsque le parasite migre plus au sud.

Sources : Lien1, Lien2 et Lien3

Zacarias, 2020 Figure 2 : Carte de Zacarias, 2020 illustrant l’arrivée potentielle de S. frugiperda sur certaines plantes hôtes selon trois scénarios tenant compte de conditions bioclimatiques : a) scénario actuel, b) scénario optimiste (RCP 2.6) et c) scénario pessimiste (RCP 8.5). RCP pour “Representative Concentration Pathway” (en anglais) ou “Profils représentatifs d'évolution de concentration” (en français). L'échelle de co-occurrence va du gris (zones où potentiellement la rencontre entre le ravageur et les plantes hôtes n’aura pas lieu) au vert foncé (zones où la rencontre est fortement probable).

Xylella fastidiosa


France / Multi-espèces / Evaluation de l'état sanitaire, Notifications de nouveaux cas

En France, la bactérie Xylella fastidiosa présente en Corse et en région PACA, touche désormais la région Occitanie. La détection de la bactérie a été confirmée par une analyse officielle le 01/09/20 sur des lavandins d’une pépinière de la commune de Trèbes dans l’Aude (BHV-SV 2020/36) Des analyses complémentaires ont permis d’identifier qu’il s’agissait de la sous-espèce X. fastidiosa subsp. multiplex. Par la suite, les mesures de lutte et de surveillance prévues par la réglementation ont été mises en place, incluant la destruction de végétaux, des restrictions de déplacement de végétaux, des traitements insecticides et la surveillance dans un rayon de 2,5 km autour de la zone infectée. Puis, lorsqu’un second foyer a été détecté à proximité sur la commune de Capendu, un recensement exhaustif des végétaux hôtes au sein des zones tampons initiales a été réalisé en zone agricole, semi-naturelle, au niveau de ripisylves, de friches, de zones urbaines, mais aussi de jardins, d’espaces verts et de forêts. Ainsi, au cours de cette surveillance renforcée et d’enquêtes épidémiologiques, 1210 prélèvements ont été réalisés en zones délimitées en 2020 et 69 étaient positifs à X. fastidiosa (5,7 %). Cette surveillance a permis de détecter 22 zones infectées, qui s’étendent à proximité des communes de Trèbes et Capendu (au 18/02/21).

Les espèces-hôtes suivantes ont été détectées positives à X. fastidiosa subsp. multiplex : Amandier, Coronille, Faux Genêt d’Espagne, Laurier sauce, Lavande, Lavandins, Luzerne, Nerprun alaterne, Perovskia, Romarin, Sauge de Jerusalem, Lavande hybide, Lavande d’Afganistan, Lavandula, Prunus (arbres à noyau divers dont Amandier sauvages). Les contaminations ont principalement été détectées sur des espèces ornementales ou naturellement présentes dans des milieux non cultivés. La mise en évidence de quatre luzernes (Medicago sativa) sur deux parcelles agricoles et d’un amandier sauvage positifs est à souligner. La prise en compte d’un maximum d’informations sur les réservoirs sauvages permet aux autorités et aux agents réalisant la surveillance d’adapter leurs mesures de surveillance et de lutte autour de ces foyers.

Sources : Lien1 et Lien2

Pour suivre l’évolution de la bactérie X. fastidiosa en France, la cartographie des zones délimitées est disponible sur le site web de l’Anses.

draaf Figure 3 : Carte des 22 zones infectées par X. fastidiosa subsp. multiplex dans l’Aude (en date du 18-02-2021), avec les zones infectées (50 m des végétaux contaminés) en orange, les zones tampons (2,5 km des zones infectées) en pointillé rouge, et les interceptions en noir. Source : DRAAF Occitanie