Le bulletin d’Épidémiosurveillance en Santé Végétale est une revue des actualités concernant la santé du végétal en Europe et à l’International. Il contribue à faciliter l’accès aux informations concernant la santé des végétaux et leur diffusion. Le bulletin est validé au préalable par une cellule éditoriale composée d'experts scientifiques et de collaborateurs partenaires ayant un rôle de conseillers.



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Sommaire

Sujet phytosanitaire Zone géographique Cultures Nature de l'information
Dépérissement de la vigne France Vignes Evaluation de l'état sanitaire ; Notifications de nouveaux cas
Fusarium oxysporum f. sp. cubense Tropical race 4 Australie Bananes Revue scientifique - Mesures de surveillance ; Mesures de lutte
Popillia japonica Suisse Multi-espèces Evaluation de l'état sanitaire ; Notifications de nouveaux cas
Xylella fastidiosa Italie Multi-espèces Revue scientifique - Méthodes pour améliorer la surveillance


Références des articles traités dans ce bulletin selon les organismes nuisibles et l'échelle spatiale


pays PAYS



Dépérissement de la vigne - Flavescence dorée et maladie du bois noir


France / Vignes / Notifications de nouveaux cas, Évaluation de l'état sanitaire
La flavescence dorée est une maladie de quarantaine causée par le phytoplasme du genre 'Candidatus Phytoplasma'. Fortement épidémique, cette maladie est principalement transmise par la cicadelle vectrice Scaphoideus titanus ainsi que par le greffage. Le bois noir de la vigne est dû à la présence du phytoplasme du stolbur ‘Candidatus Phytoplasma solani’. Il s’agit d’un organisme réglementé non de quarantaine de l’Union européenne sur vigne. Les symptômes de ces deux maladies sont très similaires. En France métropolitaine, la flavescence dorée touche principalement le sud du pays. La surveillance de la maladie est d’abord évènementielle (basée sur l'observation de symptômes) et se déroule de fin juillet à début novembre. En cas de suspicion, des échantillons de feuilles symptomatiques sont prélevés afin de réaliser des analyses selon une méthode officielle par un réseau de quatre laboratoires agréés par le ministère en charge de l'agriculture. Dans le bilan national de la surveillance de la flavescence dorée de 2019 (disponible prochainement sur le site du ministère de l’agriculture et de l’alimentation), six micro-foyers ont été découverts dans les vignobles du Nord Est de la France. Ces derniers étaient limités à un cep contaminé par parcelle : cinq en région champenoise (Marne, Aube, Aisne) et un dans le Haut-Rhin où le vecteur est absent. Pour ces cas, les profils génétiques de la flavescence dorée ont permis de suspecter une origine environnementale. En effet, des insectes polyphages pourraient avoir transmis la maladie aux ceps par l’intermédiaire de végétaux hôtes sauvages tels que l’aulne ou la clématite sauvage contaminés par des phytoplasmes. En 2020, suite à une prospection menée en septembre dans les communes de Chouilly, Pierry et Cuis dans la Marne dans la région Grand Est, deux ceps ont été testés positifs à la flavescence dorée. La majeure partie des autres ceps contrôlés se sont révélés positifs au bois noir. Suite à ces nouvelles détections, il est conseillé aux viticulteurs d’augmenter leur vigilance, et en cas de suspicion, de ne pas tailler les pieds qui présentent des symptômes et d’alerter le DRAAF/SRAL. Source : Lien

Figure 1 : Localisation des communes impactées par des détections de Flavescence dorée dans la région Grand-Est en 2019 et 2020 (sources : lhebdoduvendredi.com et lalsace.fr)

Popillia japonica


Suisse / Multi-espèces / Notifications de nouveaux cas, Évaluation de l'état sanitaire
Popillia japonica a été détecté pour la première fois en 2017 en Suisse, dans le canton du Tessin (Ticino) situé au sud du pays et frontalier à l’ouest avec les régions italiennes du Piémont et de la Lombardie (zone d’introduction du ravageur en Europe). Depuis lors, cet organisme de quarantaine prioritaire dans l’Union européenne semble établi dans la région. L’Office Fédéral de l'Agriculture (OFAG) et l’OEPP ont fait état de plusieurs adultes de scarabées japonais retrouvés cet été dans des plants de vignes (sans dégâts associés) et dans des pièges situés à Mendrisio, une commune du Tessin. Aujourd’hui, l'OFAG confirme la dissémination de Popillia japonica dans tout le Sottoceneri (partie du canton du Tessin couvrant les districts de Lugano et Mendrisio) et a publié le 1er décembre 2020 des mesures d’enrayement pour stopper autant que possible la propagation de l’insecte dans le canton du Tessin. Ces mesures d'urgence prévoient une délimitation précise des zones tampon et infestées mais aussi des règles strictes concernant le transport et l’utilisation de marchandises à risque tels que les végétaux racinés, le compost végétal et les terreaux. Source : Lien

Figure 2 : Délimitation des zones réglementées (zone infestée et zone tampon) vis à vis de Popillia japonica, pour le canton du Tassin en Suisse, et les régions du Piémont et de Lombardie en Italie (sources : 4.ti.ch)

Xylella fastidiosa


Italie / Multi-espèces / Revue scientifique - Méthodes pour améliorer la surveillance
Philaenus spumarius L. est le principal vecteur de Xylella fastidiosa dans les Pouilles, en Italie. La propagation de la bactérie est notamment liée à la capacité de dispersion de P. spumarius, dont la durée de vie de l’insecte adulte est relativement longue (estimée à 210 jours). Cette étude via une approche de « marquage-lâcher-recapture » (ou MRR pour mark-release-recapture) visait à estimer la capacité de dispersion naturelle des insectes adultes dans deux agroécosystèmes différents : une oliveraie et une prairie dans deux régions italiennes (respectivement, les Pouilles et le Piémont). Pour cette étude, sept essais indépendants ont été réalisés sur 2 années successives en utilisant des vecteurs adultes capturés dans les herbes de prairies exemptes de X. fastidiosa. Une fois marqués à l’albumine, les insectes ont été relâchés dans les deux agroécosystèmes, puis recapturés à différentes dates et à différentes distances du point des insectes relâchés. Les analyses qui ont suivi, analyses de la détection du marqueur (technique ELISA) puis analyses statistiques (estimation du noyau de dispersion ou dispersal kernel), ont montré que la dispersion de P. spumarius était plus élevée dans la prairie que dans l'oliveraie. Les mesures européennes actuelles mises en place pour lutter contre X. fastidiosa prévoient la destruction des plantes sensibles à la bactérie situées dans un rayon de 50 m autour des plantes testées positives. Cette règle est basée sur des études antérieures sur P. spumarius. Or cette étude montre clairement que le principal vecteur de X. fastidiosa est capable de se disperser sur une distance supérieure à 50 m au cours de sa vie. Les auteurs ont estimé que dans l’oliveraie, 50% de la population de P. spumarius se déplace jusqu'à une distance de 200 m et 2% se déplace au-delà de 400 m entre mai et juin, période durant laquelle la population de P. spumarius atteint un pic dans les oliveraies des Pouilles. Ces travaux, même s’ils ne prennent pas en compte certains facteurs pouvant aussi intervenir dans la capacité de dispersion de P. spumarius (e.g.conditions climatiques, physiologie de la plante hôte), apportent des informations intéressantes et montrent qu’en matière de surveillance, les mesures réglementaires européennes en vigueur pour les zones limitées demeurent adaptées. En effet, l’article 10 du RÈGLEMENT D’EXÉCUTION (UE) 2020/1201 prévoit la conception de prospections et d’échantillonnages qui tiennent compte du fait que les 400 premiers mètres d'une zone tampon (entourant la zone infectée) présentent un risque plus élevé d’infection. Sources : Lien

Fusarium oxysporum f. sp. cubense Tropical Race 4


Australie / Bananes / Revue scientifique - Mesures de surveillance, Mesures de lutte
Cette étude réalisée par l’Université de Wageningen (Pays-Bas) a analysé les collaborations public-privé en matière de service de biosécurité en Australie, dans le contexte de l’épidémie de la maladie de la fusariose des bananiers. Cette maladie, causée par Fusarium oxysporum f. sp cubense Race 4 (Foc TR4), a été détectée pour la première fois en 2015 dans une ferme de Tully, dans le nord du Queensland, une région où se situent 90% des exploitations commerciales du pays et où sont produites 372 000 tonnes de bananes pour la consommation intérieure. Suite à cette première détection, trois autres plantations de la vallée de Tully ont été infectées en 2017, 2018 et début 2020 respectivement (Département de l’Agriculture et de la Pêche du Queensland). Le terme de biosécurité, d’après la FAO (2007), définit une « approche stratégique et intégrée englobant les cadres politiques et réglementaires qui permettent d'analyser et de gérer les facteurs de risque pertinents pour la vie et la santé humaine, animale et végétale, ainsi que pour l'environnement » (traduit de l’anglais). Le système australien de biosécurité agricole vise à empêcher l'entrée et l'établissement d'organismes nuisibles exotiques dans le pays, à lutter contre les organismes nuisibles déjà établis, à comprendre et quantifier les impacts des organismes nuisibles, et à démontrer l'absence d'organismes nuisibles (National Biosecurity Committee 2013). Les acteurs du public et du privé sont tous signataires de l’« Acte de réponse d'urgence aux ravageurs des plantes » (ou l’EPPRD pour « Emergency Plant Pest Response Deed »), qui leur impose de financer tout plan d'intervention contre l’introduction et/ou la propagation d’un organisme nuisible. L’EPPRD classe une maladie en fonction de l’incidence de l'éradication pour le privé et le public et utilise cette norme pour déterminer le pourcentage des coûts supportés par le gouvernement et par l'industrie et prévoit aussi indirectement les règles d’indemnisations des producteurs pour la destruction des cultures infestées. Ce modèle repose donc sur une responsabilité partagée entre l’État et l'industrie, avec cependant depuis plusieurs années, l’expérience d’une diminution des dépenses publiques et une augmentation de financements issus du secteur privé, pour répondre au principe de l’utilisateur-payeur. A travers cette étude, l’auteur vise donc à examiner l’influence du modèle industriel sur les stratégies de lutte contre la fusariose des bananiers en Australie et examine les implications de ce modèle sur les débats autour de l'intervention des pouvoirs publics, la collaboration entre les secteurs public et privé et la fourniture de biens publics pour traiter les aspects de biosécurité. L’étude repose principalement sur des données bibliographiques et des entretiens conduits avec des représentants du gouvernement, des chercheurs universitaires, des acteurs de la filière banane et de la protection des végétaux en Australie. Cette étude fait ressortir que si la stratégie de biosécurité végétale australienne montre clairement une coordination entre le public et le privé, des lacunes et des tensions apparaissent notamment au niveau de la prestation de services, avec un long délai de réponse (sur la base de l’expérience de producteurs). La recherche et le développement se retrouvent à naviguer entre la réponse aux besoins directs et immédiats de l'industrie (priorités de recherche guidées par l'industrie), et le soutien à des projets de recherche exploratoire à plus long terme. Bien que la confiance dans l'industrie semble plus grande que celle dans le gouvernement lorsqu’il s’agit d’apporter une réponse rapide aux situations d'urgence, les acteurs du privé semblent souhaiter davantage de cadre gouvernemental réglementaire en matière de biosécurité, la biosécurité étant considérée comme un bien public, avec des pouvoirs non transférables à l’industrie. Ainsi il semblerait que la collaboration public-privé en Australie fonctionne relativement bien. Cela tiendrait notamment au fait que les profils des producteurs et industriels australiens sont assez homogènes et au fait que l’État est capable en cas d'urgence exceptionnelle, de consacrer des ressources financières supplémentaires pour faire face à l’épidémie. Malgré tout, les projections à long terme concernant la filière de la banane et la fusariose en Australie varient selon les acteurs. Les acteurs du privé (producteurs et industriels) sont plutôt optimistes, principalement parce qu’ils considèrent que tant que la réglementation en vigueur et ses mesures d’accompagnement (y compris les sanctions) seront appliqués dans les exploitations, la maladie ne se propagera pas davantage. Les acteurs du public sont quant à eux plutôt pessimistes, principalement parce qu’ils pensent qu’il sera difficile de contenir l’épidémie compte tenu des mouvements nombreux dans l’industrie de la banane et du climat très humide de la région de Tully (lieu du foyer actuel de FocTR4), facteurs qui risquent de favoriser la propagation de la maladie. Source : Lien