Le bulletin d’Épidémiosurveillance en Santé Végétale est une revue des actualités concernant la santé du végétal en Europe et à l’International. Il contribue à faciliter l’accès aux informations concernant la santé des végétaux et leur diffusion. Le bulletin est validé au préalable par une cellule éditoriale composée d'experts scientifiques et de collaborateurs partenaires ayant un rôle de conseillers.



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Sommaire

Sujet phytosanitaire Zone géographique Cultures Nature de l'information
Xylella fastidiosa Espagne Multi-espèces Revue scientifique - Évaluation de l'état sanitaire
Agrilus planipennis Etats-Unis Frênes Revue scientifique - Évaluation du risque environnemental
Agrilus planipennis Canada Frênes Revue scientifique - Évaluation du risque environnemental
Agrilus planipennis Russie Frênes Revue scientifique - Évaluation du risque environnemental


Références des articles traités dans ce bulletin selon les organismes nuisibles et l'échelle spatiale

pays PAYS



Xylella fastidiosa


Espagne / Multi-espèces / Revue scientifique - Évaluation de l'état sanitaire

L’Europe était considérée comme exempte de Xylella fastidiosa jusqu’en 2013 où l'agent pathogène a été détecté sur des oliviers dans la région de Salento en Italie. Sur l’île espagnole de Majorque, la bactérie a été détectée en 2016, pourtant, les études épidémiologiques et dendrochronologiques montrent que les bactéries de sequences-types (ST) 1 et 81 étaient présentes depuis 1993 environ. Ainsi, les fortes mortalités d’amandiers relevées depuis 2003 étaient faussement associées à des maladies fongiques. A ce jour à Majorque, la maladie de la brûlure foliaire des amandiers (almond leaf scorch disease ; ALSD) touche plus de 81% des amandiers et la maladie de Pierce (MP) est répandue dans les vignobles, bien que produisant en moyenne peu d'impact économique. D’autre part, il est intéressant de noter que les îles Baléares détiennent la plus grande diversité génétique connue de X. fastidiosa en Europe. Plusieurs études ont analysé les données issues de la surveillance de 2016 à 2020 sur ces îles Baléares. Ces dernières ont été mises en perspective dans une publication afin de comprendre les causes sous-jacentes de l'émergence et de la propagation de X. fastidiosa parmi les cultures et les plantes sauvages aux Baléares et d’évaluer son influence sur le paysage.

La surveillance a été réalisée en adaptant le nombre de prélèvements en fonction de la surface des différentes îles, sur des plantes symptomatiques et asymptomatiques. Les plantes présentant un intérêt économique ont majoritairement été échantillonnées. Ces dernières ont été obtenues via 3 types de surveillance : (i) échantillonnage aléatoire dans le cadre de la surveillance officielle, (ii) surveillance réalisée dans le cadre de différents projets de recherche, (iii) prélèvements réalisés dans le cadre de réseaux professionnels. Sur les 13 610 échantillons analysés appartenant à 96 familles botaniques, 28 espèces végétales (14 familles botaniques) ont été identifiées comme hôtes du pathogène, soit 6,2% du nombre d'hôtes potentiels analysés, comprenant notamment vignes, amandiers, oliviers et figuiers. Ces résultats ont permis de révéler la présence de quatre ST appartenant à trois sous-espèces aux îles Baléares : (i) ST1 appartient à la sous-espèce fastidiosa, cause la MP sur les vignes et l’ALSD sur les amandiers ; (ii) ST7 et ST81 de la sous-espèce multiplex ; (iii) ST80 de la sous-espèce pauca majoritairement retrouvé sur les oliviers. Suite à l’analyse des données génétiques, et en particulier la prédiction de l’évolution des souches bactériennes, les auteurs évoquent le risque de sélection divergente de la souche ST80 si cette dernière entrait en contact avec les autres sous-espèces. En effet, de nouveaux recombinants avec une virulence et des gammes d'hôtes imprévisibles pourraient être générés. Ce risque est plus important chez des plantes telles que l'amandier qui peuvent héberger les trois sous-espèces. Les analyses indiquent également que la diversité génétique de X. fastidiosa dans les îles Baléares est probablement le résultat de deux principales voies d'introduction : le commerce de plantes ornementales et le mouvement de matériel végétal à des fins de reproduction et d'amélioration des cultures, même si une forte incertitude entoure l'origine des souches ST7 détectées seulement sur deux échantillons (Polygala et Prunus dulcis). En terme de phytopathologie, une maladie émergente affectant les figuiers est causée par la souche ST81. L'étiologie de cette dernière n'a pas encore été étudiée, cependant au vu de son expansion et de sa sévérité, les auteurs conseillent d’être vigilants. L’étude montre aussi que les symptômes de l'ALSD précèdent les symptômes associés aux champignons, montrant le rôle prépondérant de X. fastidiosa sur le développement de cette maladie. Alors que les vergers d'amandiers ont une place importante dans le paysage majorquin, la propagation de l’ALSD entraîne un remplacement progressif de ces derniers par des champs ouverts et des vergers de caroubiers. Les auteurs ont estimé que la mort des amandiers surviendrait environ 14 ans suite à l’infection des arbres.

D’autre-part, en terme de transmission, cette dernière a été démontrée dans des expériences sous serre, montrant la possibilité pour le pathogène de passer : de vigne à vigne, d’amandier à amandier mais aussi de l'amandier à la vigne. Concernant les résultats de la surveillance sur les réservoirs sauvages, ces derniers montrent que les oliviers sauvages (O. europaea var. sylvestris) qui servent fréquemment de corridor écologique reliant les cultures, les zones de végétation herbacée et les forêts, sont les principaux hôtes sauvages de X. fastidiosa. D'autres hôtes tels que le romarin, ou la lavande pourraient aussi être des hôtes sauvages aux îles Baléares. Au contraire, d’autres espèces comme Quercus ilex (chêne vert), qui vit en sympatrie avec les oliviers sauvages ou encore Pinus halepensis (pin d’Alep), Citrus spp. (ciste), Ulmus minor (orme champêtre), Pistacia lentiscus (pistachier lentisque), Myrtus communis (myrte), Juniperus oxycedrus (cade), Juniperus phoenicia (genévrier de Phénicie), et Ceratonia siliqua (caroubier) n’ont pas été trouvés infectés par la bactérie, suggérant un statut de non-hôte (données confirmées par les infections en conditions contrôlées pour le chêne vert). L’influence des conditions environnementales, en particulier l’apport en eau sur le développement de l’infection de la plante est discuté et n’est pas tranchée. Les faibles taux d’infection dans les vergers d'amandiers irrigués en Californie et à Majorque comparés aux forts taux observés dans les vergers pluviaux de Majorque qui reçoivent uniquement de l’eau de pluie suggèrent que l’irrigation limiterait l’expression de la maladie. Cette tendance est observée dans une moindre mesure sur la MP.

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Agrilus planipennis


États-Unis, Canada, Russie / Frênes / Revue scientifique - Évaluation du risque environnemental

Agrilus planipennis (emerald ash borer (EAB) ou agrile du frêne) est un coléoptère qui serait originaire de l’Est asiatique. Il aurait été introduit au début des années 1990 en Amérique du Nord (Canada et États-Unis) et en Russie occidentale (Schrader et al., 2021), cependant, les premières détections officielles n’ont été enregistrées qu’en 2002 pour l’Amérique du Nord et qu’en 2007 pour la Russie, dans la région de Moscou (CABI). Récemment, le coléoptère a été identifié en Ukraine (2019) et à Saint-Pétersbourg en Russie (2020) (OEPP).

L'agrile du frêne colonise principalement les frênes (Fraxinus spp.) et peut provoquer la mort des arbres par destruction totale des assises génératrices (fiche SORE). Une nouvelle analyse du risque environnemental lié à A. planipennis vient d’être publiée (Schrader et al., 2021). Il s’agit d’une étude de cas visant à évaluer l'ampleur de l'impact que peut avoir le ravageur au bout de 5 ou 20 ans sur les zones urbaines ou forestières suite à son introduction et à sa propagation en Amérique du Nord (Canada et États-Unis) et en Russie occidentale. L’étude précise qu’en août 2020, le coléoptère a été détecté dans 35 États nord-américains, cinq provinces canadiennes et 17 districts administratifs de la Fédération de Russie. L’analyse rétrospective qui a été réalisée visait pour ces trois pays à évaluer les impacts sur différents services écosystémiques/écologiques et sur la biodiversité des zones nouvellement infestées. Les experts ont évalué les impacts sur les zones urbaines et sur les zones forestières (séparément) pour trois grands types de services écosystémiques regroupant plusieurs composantes : (1) les services d'approvisionnement (nourriture, fibres, médicaments biochimiques et naturels, ressources ornementales, ressources génétiques, eau) ; (2) les services de régulation (de la qualité de l'air, du climat, du cycle de l'eau, de l'érosion) ; et (3) les services de support (cycle des nutriments, photosynthèse et production primaire, régulation des parasites et des maladies). L’évaluation de l’impact portait aussi sur la biodiversité à travers l’examen des composantes suivantes : diversité génétique, diversité des espèces indigènes, composition et structure des habitats, des communautés et/ou des écosystèmes, espèces rares ou vulnérables, et habitats à haute valeur de conservation. Les résultats de l’évaluation des risques pour chacune des composantes ont été synthétisés par les auteurs sous forme de tableaux en considérant les cinq classes d'évaluation de l’EFSA (minimale, mineure, modérée, majeure et massive). Par exemple, un risque majeur est prédit à long terme pour les ressources ornementales des zones urbaines alors que ce risque apparaît modéré en forêt. Dans les zones urbaines, les impacts dépendraient principalement de l'efficacité des insecticides systémiques (à priori moins efficaces que les ennemis naturels présents en forêts) et de la méthodologie d'abattage et de remplacement des frênes. Quel que soit l’écosystème (ville ou forêt) et le type de service écosystémique ou la composante de biodiversité considérée, l’impact global calculé apparaît mineur à court terme et modéré à long terme. Par contre l’impact à long terme sur la biodiversité apparaît majeur pour les forêts.

L'étude de cas a permis d’évaluer de manière quantitative les conséquences des impacts d'A. planipennis sur les services écosystémiques tout en considérant les incertitudes. Les auteurs mentionnent que cette approche d’évaluation « générale » (les zones évaluées des trois pays ont été considérées ensemble pour donner une vue générale des impacts) pourrait être utile aux décideurs et gestionnaires du risque qui doivent comparer les coûts de la lutte avec les impacts potentiels du ravageur. L'existence de corrélations entre l'abondance de l'organisme nuisible et les impacts, nécessite d'approfondir les connaissances au niveau local, ainsi que sur la distribution spatiale.

Source : Lien