Le bulletin d’Épidémiosurveillance en Santé Végétale est une revue des actualités concernant la santé du végétal en Europe et à l’International. Il contribue à faciliter l’accès aux informations concernant la santé des végétaux et leur diffusion. Le bulletin est validé au préalable par une cellule éditoriale composée d’experts scientifiques et de collaborateurs partenaires ayant un rôle de conseillers.



Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Pas de modification
CC BY-NC-ND
Code juridique
Conformément aux productions réalisées par la Plateforme d’Épidémiosurveillance en Santé Végétale (ESV), celle-ci donne son droit d’accès à une utilisation partielle ou entière par les médias, à condition de ne pas apporter de modification, de respecter un cadre d’usage bienveillant et de mentionner la source © https://www.plateforme-esv.fr/


Le bulletin est enregistrable dans son format html sur votre ordinateur. Toutes les cartes du bulletins sont interactives (zoom/dézoom, informations cliquables directement sur la carte).


Sommaire
Sujet phytosanitaire Zone géographique Cultures Nature de l’information
Bursphelenchus xylophilus Europe Pins Evaluation du degré de confiance statistique des enquêtes phytosanitaires annuelles
Candidatus Liberibacter spp. et ses vecteurs Bassin Méditerranéen Citrus Estimation du risque épidémiologique
Xylella fastidiosa Italie Chataîgniers Evolution de l’état sanitaire
Dépérissement de la vigne - Flavescence dorée Espagne Vignes Evolution de l’état sanitaire

Bursaphelenchus xylophilus


Europe / Pins / Evaluation du degré de confiance statistique des enquêtes phytosanitaires annuelles

Dans l’Union européenne (UE), le nématode du pin (Bursaphelenchus xylophilus) est un organisme nuisible de quarantaine prioritaire. Les États membres ont pour obligation de mener une surveillance annuelle afin de i) garantir que le territoire est exempt du nématode du pin et ainsi faciliter les procédures dans le cadre des échanges commerciaux ou ii) détecter précocemment le nématode du pin pour garantir une éradication possible avec un niveau de confiance élevé.

Dans le cadre d’un projet scientifique soutenu par l’EFSA1, une application web nommée NoBaSURV-PWN a été développée pour évaluer la probabilité d’absence du nématode du pin sur le territoire et son niveau de confiance/sensibilité selon les deux objectifs définit ci-dessus. Pour cela, le territoire visé pour évaluer la surveillance réalisée est divisé en plusieurs parties (cela peut être des régions ou des strates liées à différents niveaux de risque). Différents paramètres sont fournis par le gestionnaire en entrée pour l’analyse :

  1. la prévalence de configuration du réseau de surveillance (prévalence que l’enquête est bien conçue pour détecter le nématode du pin dans le cas où celui-ci est présent dans la zone surveillée) qui tient compte de i) la plausibilité biologique, ii) la prévalence minimale qu’une inspection vise à détecter dans l’unité d’inspection, et iii) soit la proportion minimale de la superficie infestée par le nématode du pin par rapport à la superficie totale contenant des plantes hôtes que l’enquête vise à détecter (objectif échanges commerciaux), soit de la superficie maximale acceptable d’infestation par le nématode du pin au moment de la détection (objectif détection précoce avec éradication possible) ;
  2. la sensibilité de la méthode de détection ;
  3. la probabilité que le territoire était exempt du nématode du pin avant le début des enquêtes de surveillance ;
  4. du temps moyen entre l’entrée du nématode du pin sur le territoire, son transfère à une plante hôte et la mise en place des mesures de gestion.

Deux options de surveillance basée sur le risque sont proposées pour l’analyse. La première option tient compte de la surface relative ou du nombre de sites à risque d’entrée et la deuxième option tient compte de la population cible présente dans un rayon définis autour des sites à risque d’entrée. Les données des sites à risques peuvent être récupérées grâce à l’application web NoBa Land Cover Retriever.

Pour illustrer l’utilisation de NoBaSURV-PWN, Hannunen et al. (2023) ont évalué les enquêtes de surveillance du nématode du pin conduites en Estonie, Finlande, Lituanie, Norvège et Suède, principalement centrées sur l’échantillonnage des matériaux en bois propices à la reproduction du vecteur, Monochamus spp., et sur le piégeage des Monochamus spp. adultes. Parmi les résultats de ces évaluations, il ressort que pour les cinq pays, la sensibilité de leur réseau de surveillance est plus élevée pour un objectif de facilitation des échanges commerciaux que pour un objectif de détection précoce pour une éradication possible. Les résultats pour la Lituanie et la Norvège montrent une probabilité d’absence d’établissement du nématode du pin assez faible (< 0.5 pour la Lituanie et < 0.8 pour la Norvège), même lorsque le temps moyen considéré pour une invasion est élevé. Cela suggère la nécessité d’améliorer le réseau de surveillance dans ces pays pour garantir l’objectif d’une détection précoce pour une éradication eficace avec un niveau de confiance élevé. Au contraire, l’Estonie, la Finlande et la Suède sont des pays pour lesquels les résultats de l’analyse de leurs données de surveillance permettent de confirmer avec confiance l’absence d’établissement du nématode du pin sur leur territoire.

Le document rédigé par Hannunen et al. (2023) et un support de présentation présentant l’application (accessible ici) donnent toutes les instructions sur la manière de procéder à une évaluation avec l’application NoNaSURV-PWN, et le premier donne accès aux détails techniques et au code source de l’application.

1 : Consortium avec l’autorité alimentaire finlandaise, l’office estonien de l’agriculture et de l’alimentation, le service national des plantes relevant du ministère de l’agriculture de la République de Lituanie, le comité scientifique norvégien pour l’alimentation et l’environnement et l’Université suédoise des sciences agricoles.

Source : Hannunen et al. 2023

Candidatus Liberibacter spp. et ses vecteurs


Bassin méditerranéen / Citrus / Estimation du risque

Le huanglongbing (HLB) est principalement causée par Candidatus Liberibacter asiaticus (CLas), Ca. L. africanus (CLaf) et Ca. L. americanus (Clam). Cette maladie n’a, à ce jour pas été signalée dans le bassin méditerranéen, cependant ses vecteurs Diaphorina citri (Asian citrus psyllid ou ACP) et Trioza erytreae (African citrus psyllid ou AfCP) sont présents, notamment au Portugal, en Espagne et récemment à Chypre (BHV-SV 2023/35). Il est également à noter qu’au cours des dernières années, le délai entre l’introduction d’un vecteur et l’apparition de foyers de HLB a été progressivement réduit. Les enjeux sont d’autant plus importants que le bassin méditerranéen représente environ 12% des superficies agrumicoles mondiales, dont environ 23% se trouvent en Espagne. En l’absence de cultivars d’agrumes résistants et de traitement efficace contre le HLB, la lutte anti-vectorielle est la pierre angulaire de la gestion de la maladie, permettant d’agir au niveau de la transmission. Les traitements sont généralement réalisés à l’échelle du verger, cependant, d’autres méthodes existent, notamment la lutte à l’échelle de larges zones dont le principe est d’appliquer des mesures coordonnées dans les différents vergers d’une zone par exemple. Ces méthodes ont été expérimentées contre les CLas et ACP au Brésil, en Chine, au Mexique, en Argentine, en Californie, en Floride et au Texas dans le but de maintenir la production ou encore d’empêcher la propagation de la maladie dans de nouvelles zones.

L’étude de Galvañ et al. (2023) a développé une approche pour la définition de larges zones, en fonction du risque, qui seraient une échelle pertinente pour la mise en place de mesures de gestion. Dans l’étude, ces larges zones sont définies comme des zones de lutte contre les organismes nuisibles (Pest Management Area (PMA)). Une grille contenant des cellules de 1km2 a été utilisée pour faciliter la régionalisation. La Communauté autonome valencienne a été sélectionnée comme zone d’étude. Cette région est composée de trois provinces : Alicante, Castellón et Valence. Les comtés « La Ribera Alta » et « El Camp de Túria » de la province de Valence sont particulièrement étudiés dans l’article. L’analyse prend en compte différents facteurs de risque d’introduction et de diffusion du HLB, en s’appuyant sur la biologie des insectes vecteurs. De façon simplifiée, les facteurs de risques retenus sont en lien avec l’humidité relative, la température, le statut des vergers (culture conventionnelle, biologique, ou non-cultivé) et les voies de transport. Ces derniers ont été calculés en prenant plusieurs éléments en compte. A titre d’exemple, l’adaptation au climat prend en compte le nombre de degrés-jours nécessaires pour qu’un œuf de D. citri ou de T. erytreae devienne adulte (variable en fonction des espèces considérées), le nombre potentiel de générations, le nombre de « jours favorables » aux insectes en fonction de paramètres biologiques issus de la littérature. Ainsi, la température moyenne est considérée favorable entre 10 et 33°C et le calcul permet l’exclusion de conditions défavorables au niveau de l’humidité relative et lorsque la température est supérieure à 27°C. D’autre-part, la présence d’agrumes dans des résidences privées a été estimée en prenant en compte le rapport entre le nombre d’agrumes résidentiels et le nombre d’habitants. Ce rapport a été estimé sur la base du recensement des agrumes de la ville de Séville (car les données sont très complètes dans cette commune), puis ce dernier a été transposé sur la zone d’étude grâce aux données de densité de la population. Pour la régionalisation, l’algorithme Ward-like de clustering hiérarchique du package R ClustGeo a été utilisé pour définir la taille et la localisation des PMA. Cette technique de régionalisation est utilisée dans d’autres domaines comme en économie, mais il semblerait que cette étude soit la première à l’utiliser en santé des plantes. La méthodologie a été appliquée pour deux scénarios d’importance relative des différents facteurs et pour les deux espèces de vecteurs, produisant donc 4 scénarios.

Pour les deux scénarios et des conditions de paramètres fixés détaillées dans l’article, le nombre de PMA a été estimé pour D. citri à 25 dans le comté de El Camp de Túria et à 33 dans celui de La Ribera Alta. Pour T. erytreae, le nombre de PMA a été estimé à 25 et 31 respectivement dans ces deux comtés. D’après les auteurs, le plus grand potentiel de cet algorithme est la considération d’attributs spatiaux regroupées et modulées par rapport au risque pour adapter les mesures de gestion.

Dans la littérature, il existe différentes recommandations concernant la taille de la zone pour gérer le HLB, comme 500 ha au Brésil ou entre 4 000 et 20 000 ha en Californie. Néanmoins, les systèmes agricoles au Brésil et en Californie sont généralement composés de grands vergers. Cela contraste avec le contexte agrumicoles du bassin méditerranéen qui par exemple avec l’Espagne, possède des exploitations plus petites et divisées en vergers de moins de 1 ha et souvent gérées de manière indépendantes par des producteurs individuels. Pour mettre en œuvre la proposition des auteurs, la zone d’étude a été caractérisée par plusieurs facteurs de risque à une résolution de grille de 1 km2, et les différents PMA obtenus via l’algorithme présentent une variabilité en termes de surface. Ces éléments sont observables dans les cartes présentées dans l’article.

Source : Galvañ et al. 2023

Xylella fastidiosa


Italie, région des Pouilles / Chataîgniers / Evolution de l’état sanitaire, nouvel hôte

Une enquête phytosanitaire a été conduite dans le Salento sur des châtaigniers (Castanea sativa) afin de diagnostiquer la présence de la bactérie Xylella fastidiosa, associée ou non à la présence de symptômes visibles.

Jusqu’à cette étude, un seul signalement de châtaignier infecté par X. fastidiosa avait été rapporté au Portugal, sans précisions sur la souche et les symptômes associés (EFSA database 2022). La mise à jour 2023 de la liste des plantes hôtes mentionne une infection de X. fastidiosa subsp. multiplex sur châtaignier (EFSA database 2023). C. sativa est une espèce végétale importante en Europe. Elle couvre une superficie de 2.5 millions d’hectares, principalement concentrés en Italie et en France. Greco et al. (2023) ont échantillonné et diagnostiqué 15 châtaigniers répartis sur trois sites éloignés (Martano, Corigliano d’Otranto et Tavioano) situés dans la zone infectée de la province de Lecce où se trouvaient des oliviers, des pistachiers et des amandiers infectés par X. fastidiosa. Des analyses MLST (Multi Locus Sequences Typing), phylogénétique et de microscopie confocale FISH-CLSM (Fluorescence In Situ Hybridization-Confocal Laser Scanning Microscope) ont été réalisées pour caractériser la souche bactérienne et visualiser sa présence dans les vaisseaux du xylème de rameaux de châtaignier. Les auteurs ont également analysé la littérature afin de recenser des vecteurs potentiels de Xylella fastidiosa sur C. sativa.

Bien que l’incidence moyenne de l’infection ait été de 38% en avril et de 30% en juin, aucun symptôme attribuable à une infection causée par X. fastidiosa n’a été observé sur les châtaigniers échantillonnés. La concentration bactérienne dans les rameaux âgés d’un an était relativement faible comparée à celle trouvée dans les oliviers et la vigne sensibles. Les analyses de microscopie ont permis de visualiser une colonisation par la bactérie de 5.8% à 12.6% des vaisseaux du xylème. Les analyses MLST et l’arbre phylogénétique ont permis de confirmer que la souche infectant C. sativa était X. fastidiosa subsp. pauca « De Donno » (génotype ST53). L’analyse bibliographique portant sur l’entomofaune des hémiptères associés à C. sativa a recensé Philaenus spumarius et Neophilaenus campestris, les deux insectes responsables de l’épidémie de Xylella (génotype ST53) dans le Salento, mais aussi Philaenus signatus, détecté sur châtaignier en Grèce et déjà connu comme vecteur potentiel de la souche « De Donno ».

Il s’agit donc du premier signalement de X. fastidiosa subsp. pauca infectant des châtaigniers. Le génotype ST53 identifié dans cette infection a déjà été signalé dans l’infection naturelle d’une cinquantaine d’espèces végétales déjà inventoriées rien que pour l’Italie, la France et le Costa-Rica. La faible concentration bactérienne et l’absence de symptômes sur C. sativa suggèrent que cette espèce est potentiellement tolérante à la bactérie, mais qu’elle peut aussi représenter une source d’inoculum et favoriser la naissance et l’expansion d’un foyer de manière cachée.

En termes de perspectives, des études complémentaires seraient utiles pour identifier et évaluer les génotypes de X. fastidiosa capables de provoquer la maladie (et à quelle concentration) chez C. sativa. Il ressort de cette étude que pour conduire des mesures d’enrayement efficaces de X. fastidiosa, il est nécessaire de connaître toutes les espèces hôtes, y compris celles asymptomatique ou paucisymptomatique (avec symptômes non visibles ou non mesurables), et des vecteurs présents dans la zone.

Source : Greco et al. 2023

Dépérissement de la vigne - Flavescence dorée


Espagne, communauté autonome de Galice / Vignes / Evolution de l’état sanitaire

La direction générale de l’élevage, de l’agriculture et des industries agroalimentaire a étendu les zones délimitées (ZD) du phytoplasme responsable de la flavescence dorée en Galice (RESOLUCIÓN du 9 novembre 2023). Cette extension de la ZD et la modification des mesures d’éradication et de contrôle associées font suite à de nouvelles détections de l’organisme nuisible et de nouvelles captures de son vecteur (voir la carte mentionnée dans le document officiel de la Galice). Actuellement, la maladie s’est propagée aux paroisses des municipalités d’O Rosal, A Cañiza, Tomiño et Oia (province de Pontevedra) et aux communes Cortegada et Pontedeva (province d’Ourense).

Source : www.xunta.gal