Le bulletin d’Épidémiosurveillance en Santé Végétale est une revue des actualités concernant la santé du végétal en Europe et à l’International. Il contribue à faciliter l’accès aux informations concernant la santé des végétaux et leur diffusion. Le bulletin est validé au préalable par une cellule éditoriale composée d’experts scientifiques et de collaborateurs partenaires ayant un rôle de conseillers.
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Sujet phytosanitaire | Zone géographique | Cultures | Nature de l’information |
---|---|---|---|
Popillia japonica | Italie | Multi-espèces | Modélisation de la dynamique spatio-temporelle de la population |
Xylella fastidiosa subsp. pauca | Espagne, îles Baléares | Multi-espèces | Notification de nouveaux cas |
Italie / Multi-espèces / Article scientifique -
Modélisation de la dynamique spatio-temporelle de la population
La présence de l’insecte ravageur Popillia japonica a été rapportée pour la première fois en Italie en 2014. Sa dispersion touche aujourd’hui plus de 16 000 km² du territoire italien, essentiellement dans les régions de la Lombardie et du Piémont mais également, celles d’Émilie-Romagne et du Val-d’Aoste.
Pour décrire et prédire les dynamiques spatio-temporelles de la population de scarabée japonais dans le processus d’invasion en cours, Gilioli et al., 2024 ont appliqué un modèle mécaniste de réaction-diffusion. La composante ‘réaction’, simulant la croissance de la population, a été décrite via une fonction logistique de Beverton-Holt et la composante ‘diffusion’, simulant la dispersion de la population, a été modélisée par un noyau gaussien. Des équations intégro-différentielles ont permis de décrire le taux d’expansion de la population (vitesse à laquelle le front d’une population envahissante se déplace au fil du temps). L’influence potentielle du paysage sur ce taux d’expansion est pris en compte dans la composante ‘diffusion’ à travers une régression liénaire avec des données d’occupation du sol. Pour ce faire, 13 trajectoires différentes ont été sélectionnées, partant toutes de la zone présumée de la première incursion de P. japonica et allant dans différentes directions vers le front d’expansion de la population, pour permettre de prendre en compte une diversité de paysage dans les analyses (voir Figure 1). Pour chaque unité d’espace considérée pour l’analyse, le pourcentage de zone d’occupation du sol propice au développement du scarabée japonais a été calculé et varie de 50 à 89%. Les analyses ont été conduites avec un sous-ensemble de données issues de la surveillance du Service phytosanitaire de la Lombardie réalisée entre 2015 et 2021 (données d’abondance des individus adultes piégés/collectées).
Les résultats du modèle montrent des taux d’expansion actuel de P. japonica allant de 4,5 à 13,8 km/an (selon la trajectoire considérée), avec un taux moyen de 8,2 km/an, proche de celui rapporté par ailleurs (e.g. Borgogno-Mondino et al., 2022). Le modèle prédit que d’ici 2030 l’insecte se propagera de 81 à 207 km à partir du point d’établissement initial.
Lorsque les caractéristiques d’occupation du sol sont favorables au développement de la population de P. japonica, le taux d’expansion de la population prédit par le modèle augmente. Les résultats montrent un accroissement du taux d’expansion d’environ 260 m/an par pourcentage de zones d’occupation du sol propices au développement de l’insecte. Plus précisement, en regardant le type d’occupation du sol majoritairement présent au niveau des trajectoires les plus rapides de l’étude (n° 11, 12, 13), ce sont les cultures pérennes, comme les vergers, qui ressortent, suggèrant un rôle dans le taux d’expansion de P. japonica. Au contraire et de manière surprenante, la trajectoire n°4 (allant vers le Nord-Est) montre un taux d’expansion rapide (13,7 km/an) tout en ayant un pourcentage de zones d’occupation du sol propices à P. japonica parmi les plus faibles (57%). Ce résultat pourrait s’expliquer par un contexte paysager spécifique. En effet, la trajectoire n°4 est bordée par le lac de Côme et les Pré-Alpes qui pourraient agir comme des barrières naturelles forcant la propagation du ravageur dans une seule direction sans laisser le choix au ravageur de choisir sa direction en fonction du type d’occupation du sol.
Par ailleurs, P. japonica se déplace à longue distance via un comportement auto-stoppeur, notamment via le transport de marchandises, et ce comportement n’a pas été pris en compte dans les analyses. Les auteurs ont considéré que l’intégration d’une composante de dispersion à longue distance dans leur modèle permettrait d’augmenter la fiabilité des distributions estimées. En effet, ces évènements à longue distance influent sur la dispersion du ravageur, et l’expansion naturelle de son aire de répartition en Europe continentale à l’avenir pourrait augmenter d’autant plus l’importance du rôle de ces événements de dispersion à longue distance dans la dynamique spatio-temporelle du ravageur.
Pour conclure, les auteurs considèrent que leur modèle pourrait être facilement adapté et que les résultats pourraient être utilisés pour aider à la conception des mesures de confinement pour la lutte de P. japonica et lorsque cela est encore possible, servir à la mise en place de mesures d’éradication.
Figure 1 : Figure
issue de l’article de Gilioli
et al. 2024 qui montre la zone d’étude avec les 13 trajectoires
considérées (lignes rouges). Les hexagones gris sont les zones utilisées
dans l’étude pour déterminer le taux d’expansion le long des
trajectoires grâce aux données d’abondance de P. japonica
adultes. Les lignes en dégradé de gris représentent la progression du
front d’invasion surveillé de 2015 (ligne grise la plus claire) à 2021
(ligne noire).
Source : Gilioli
et al. 2024
Espagne, Îles Baléares / Multi-espèces / Notifications
de nouveaux cas
Dans le BM n°52, nous rapportions de nouveaux cas de Xylella fastidiosa dans la Communauté de Valence en Espagne en juin 2023. Aux Baléares depuis 2016, 20 804 échantillons ont été prélevés, dont 1 566 qui se sont révélés positifs à X. fastidiosa sur 38 espèces hôtes différentes. Les analyses avaient montré la présence des sous-espèces mutliplex et fastidiosa sur l’île de Majorque.
Sur cette même île, des échantillons ont été prélevés sur des plantes présentant des symptômes inhabituels. Ces derniers ont été envoyés au Laboratoire National de Référence pour les Bactéries Phytopathogènes, situé à l’Institut Valencien de Recherche Agronomique, qui a confirmé le 15 janvier 2024 qu’il s’agissait de la sous-espèce pauca et du génotype ST53. Au total, sept foyers ont été recensés dans la commune de Sencelles sur l’île de Majorque. Dans un rayon de 3 kilomètres, six foyers concernent l’infection d’oliviers sauvages et un foyer l’infection d’un laurier-rose. Les arbres en question ont été éliminés, des traitements anti-vectoriels sont prévus, ainsi qu’un échantillonnage dans un rayon de 50 mètres. En effet, un plan d’action et de confinement, sera exécuté pendant au moins un an, incluant le renforcement de la surveillance par rapport au plan d’action inter-îles, afin d’accroître la protection des oliveraies traditionnelles et productives contre cette sous-espèce.
Jusqu’alors, l’Italie était le seul pays européen où la sous-espèce pauca ST53 était présente ; seule souche virulente, bien connue pour sa propagation rapide et dévastatrice dans les Pouilles. Ces éléments justifient d’autant plus le renforcement des mesures de gestion, en parallèle de projets de recherche qui avaient déjà débuté sur la résistance variétale.
Source : caib.es,
phytoma
et valenciafruits
Figure 2 : Carte de la commune où des
échantillons ont été détectés positifs à Xylella fastidiosa subsp.
Pauca ST53 à Majorque. Source : caib.es.
Ne pas hésiter à zoomer sur la
carte.