Le bulletin d’Épidémiosurveillance en Santé Végétale est une revue des actualités concernant la santé du végétal en Europe et à l’International. Il contribue à faciliter l’accès aux informations concernant la santé des végétaux et leur diffusion. Le bulletin est validé au préalable par une cellule éditoriale composée d’experts scientifiques et de collaborateurs partenaires ayant un rôle de conseillers.
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Sujet phytosanitaire | Zone géographique | Cultures | Nature de l’information |
---|---|---|---|
Dépérissement de la vigne | France | Vignes | Modélisation bayésienne des facteurs de risques liés au terrain et au paysage |
Spodoptera frugiperda | Europe | Multi-espèces | Article scientifique (en cours de révision) sur les risques d’établissement du ravageur |
Popillia japonica | Suisse | Multi-espèces | Evolution de l’état sanitaire |
Xylella fastidiosa | Europe | Multi-espèces | Article scientifique sur la détection d’un potentiel vecteur |
Xylella fastidiosa | France | Multi-espèces | Article scientifique sur l’épidémie de Xylella fastidiosa sur le territoire national |
Flavescence dorée / France, vignobles du bordelais /
Modélisation bayésienne des facteurs de risques liés au terrain et au
paysage
En Europe, la flavescence dorée (FD) est une maladie de la vigne classée de quarantaine depuis 1993. Elle est causée par des phytoplasmes appartenant aux sous-groupes taxonomiques 16SrV-C et 16SrV-D. La FD se propage par voies végétatives (via l’utilisation de matériel végétal infecté), ou vectorielle (via Scaphoideus titanus, un hémiptère polyphage). La maladie a été décrite pour la première fois dans le Sud-Ouest de la France, dans les années 50, suite à une introduction nord-américaine de S. titanus. Elle s’est depuis établie dans la région et s’est également dispersée à d’autres vignobles français et européens. En Europe, il existe des plantes réservoirs de l’agent pathogène telles que l’aulne (Alnus glutinosa) et la clématite (Clematis vitalba). La FD est soumise à une surveillance réglementée afin de contenir son expansion, de réduire le nombre de plantes infectées à arracher et le nombre de traitements à appliquer.
Une étude visant à mieux comprendre les facteurs biotiques et abiotiques clés qui déterminent la détection et l’épidémiologie de la FD vient d’être publiée (Kwame Adrakey et al. 2022). Il s’agit d’une analyse statistique de l’impact des facteurs locaux (parcelles de vigne) et paysagés sur les probabilités de détection et d’infection de la FD dans le vignoble. Elle a été réalisée via une inférence bayésienne utilisant la méthode INLA (Integrated Nested Laplace Approximations via le package R-INLA) (Kwame Adrakey et al. 2022). Afin d’identifier les sites à cibler prioritairement pour la surveillance et les mesures de gestion de la FD, les auteurs ont à travers deux modèles spatiaux, testés différentes hypothèses. Les modèles de distribution ont été réalisés en utilisant des données géoréférencées (enquêtes conduites entre 2012 et 2016) mais aussi des données topographiques et ‘viticulturales’ (pratiques culturales et carte d’identité des vignes) de 34 581 parcelles du vignoble bordelais. L’ensemble des variables utilisées à l’échelle locale et du paysage sont résumées dans le tableau 1 de l’article (Kwame Adrakey et al. 2022).
Les résultats indiquent ou confirment que : 1) La probabilité de détection de la FD augmente à partir de la première semaine de septembre ; 2) A l’échelle de la parcelle, la probabilité d’infection augmente surtout avec la sensibilité du cultivar. La Muscadelle, le Cabernet Sauvignon et le Cabernet Franc seraient sensibles à la FD contrairement au Merlot (cépage dominant dans le vignoble bordelais) et au Sémillon ; 3) La probabilité d’infection de la parcelle décroît avec l’altitude. L’étude montre également que l’infection des parcelles dépendait du contexte paysager dans les 150 à 200 m autour, correspondant à des paysages de 7 ha (échelle de 150 m) à 12,5 ha (échelle de 200 m), et contenant en moyenne 6-10 parcelles dans la zone d’étude. Les résultats montrent que la probabilité d’infection décroît avec la proportion de vignobles dans le paysage mais aussi avec la densité de plantation, ce qui pourrait refléter un effet direct de dilution de l’inoculum disponible ou de la population de vecteurs au sein des vignobles cultivés et qui vient corroborer une hypothèse émise par Delaune et al. (2021). Ces résultats montrent aussi que les grandes parcelles de vigne sont susceptibles de bénéficier d’une protection insecticide plus homogène (hypothèse émise par Meehan et al. 2011). Par ailleurs, les résultats indiquent que la probabilité d’infection par la FD diminue avec l’augmentation des proportions de Merlot. Les pratiques agricoles (biologiques versus conventionnelles) ne semblent pas avoir d’effet à l’échelle de la parcelle, par contre, à l’échelle du paysage, les pratiques biologiques (comparées aux conventionnelles) semblent légèrement augmenter la probabilité d’infection. Une des hypothèses émises est le manque d’efficacité des produits naturels utilisés pour lutter contre S. titanus, en particulier au stade adulte, le stade le plus dispersif du vecteur.
L’utilisation du modèle en tant qu’outil prédictif, en étant actualisé tous les ans à l’issu des enquêtes de surveillance, pourrait être utilisé pour le ciblage des districts à prioriser pour les enquêtes futures dans la zone du GDON (Groupements de Défense contre les Organismes Nuisibles) des Bordeaux (y compris de nouveaux districts), notamment en discriminant les districts dont la prévalence de détection de la FD dépasse 10% des parcelles.
Source : Lien
Europe / Multi-espèces / Article scientifique (en cours
de révision) sur les risques d’établissement du ravageur
Spodoptera frugiperda est un organisme de quarantaine prioritaire présent aux Amériques, en Asie, et en Océanie (OEPP et voir le BM n°23 pour une description plus détaillée du ravageur). Dans cette étude, les auteurs ont cherché i) à prédire la dynamique et l’abondance des populations de l’espèce, ii) à évaluer le risque d’établissement de l’espèce en Europe, et iii) à prédire le risque lié aux populations de « passage » en Europe. Pour cela, ils ont utilisé une approche de modélisation physiologique (mécaniste) tenant compte de la biologie de l’espèce. Un système d’équations de Kolmogorov aux dérivées partielles a été utilisé pour simuler la dynamique de population spécifique aux stades de développement de S. frugiperda. L’abondance de la population a été prise comme mesure indirecte des impacts potentiels de S. frugiperda.
La capacité à prédire la dynamique de la population locale de S. frugiperda par le modèle développé a été testée en comparant les résultats simulés (sur la base du climat actuel) avec des données d’abondance d’adultes observés sur trois sites hétérogènes en Amérique du Nord. Les prédictions se sont avérées cohérentes et prédisent 7 générations d’adultes par an pour le comté de Miami Dade (Floride), 2 générations d’adultes par an pour le comté d’Alachua (Floride), aucun établissement possible du ravageur pour le Comté de Tift (Géorgie).
Concernant l’évaluation du risque d’établissement de l’espèce en Europe, les résultats du modèle (répartition et dynamique de population) ont permis de mettre en évidence les risques de l’implantation de l’espèce dans les zones côtières du bassin méditerranéen en raison des conditions climatiques plus favorables. Des abondances de population plus élevées sont prédites dans les zones côtières du sud de l’Espagne, du sud de l’Italie, de la Grèce, de Chypre, du sud de la Turquie et du Liban. Les différents scenarii testés par le modèle convergent tous vers une limite d’établissement de l’espèce entre le 38e et 44e parallèle nord (causée probablement par le blocage de la diapause et les conditions climatiques trop froides).
Localement, la dynamique de population de S. frugiperda a été estimée dans 3 sites spécifiques : Chypre, le sud de la France et la côte atlantique du Portugal. Une grande variabilité a été observée selon les scénarii considérés variant de 5 (+/- 4) à 139 (+/- 22) en abondance annuelle moyenne d’adultes au sein d’une même unité spatiale. A Chypre, les abondances de population de S. frugiperda sont apparues positivement corrélées avec les températures (i.e. faibles lorsque les températures sont peu élevées en début d’année et à l’automne, et plus fortes lorsque les températures augmentent au printemps et l’été) avec des pics comprenant entre 90 et 130 adultes et 4 générations possibles sur une année. Sur le site de La Seyne-sur-Mer (sud de la France) une seule génération semble pouvoir s’établir aux alentours de début septembre avec 90 adultes au maximum pour diminuer rapidement avec la baisse des températures à l’automne. Sur le site d’Alchochete (Portugal) une seule génération semble également pouvoir s’établir plutôt fin octobre avec peu d’individus (18 maximum).
La dynamique des populations de « passage » a été prédite pour quatre zones de production de maïs en Europe, qui se situent en dehors de la zone d’implantation potentielle de S. frugiperda : Rădoiești (Roumanie, 44e parallèle nord), Ghedi (Italie, 45e parallèle nord), Ouarville (France, 48e parallèle nord), et Engelsberg (Allemagne, 48e parallèle nord). Les simulations du modèle aux différentes périodes de l’année ont montré la possibilité d’observer des populations de « passage » de S. frugiperda dans des endroits en dehors de la zone d’établissement prévue en Europe. Ces résultats suggèrent un risque élevé dû aux populations de « passage » jusqu’au 45e parallèle nord, avec des abondances de population possible allant de 20 à 70 adultes.
En conclusion les auteurs signalent que leur modèle fournit des informations d’importance sur les zones à risque d’établissement de l’espèce en Europe et sur les impacts potentiels causés par les populations de « passage » sur la production agricole locale. Ces résultats pourraient être pris en compte pour organiser la surveillance de S. frugiperda en Europe.
Source : Lien
Europe, Suisse / Multi-espèces / Evolution de l’état
sanitaire
Le canton du Tessin en Suisse vient de mettre à jour la zone délimitée de Popillia japonica (mise à jour datée de mars 2022). Les nouvelles communes localisées dans la zone tampon sont : Ascona, Brione sopra Minusio, Brissago, Cugnasco-Gerra, Gordola, Lavertezzo, Locarno, Losone, Minusio, Muralto, Orselina, Ronco sopra Ascona et Tenero-Contra. La nouvelle zone tampon compte au total 44 communes. La nouvelle zone infectée quant à elle, compte au total 37 communes.
Source : Lien
Figure 1 : Carte des communes de la zone
infestée et de la zone tampon concernant Popillia japonica en
Italie et Suisse, ainsi que la commune infestée en Allemagne. Sources :
www4.ti.ch
et BM
n°36.
Europe / Multi-espèces / Article scientifique sur la
détection d’un potentiel vecteur
Commentaire du comité éditorial : La détection de Draeculacephala robinsoni dans les Pyrénées orientales n’a pas été confirmée officiellement. Les services en région y travaillent actuellement.
Chez les cicadelles, le genre Draeculacephala, est très répandu en Amérique. Aux États-Unis, en particulier en Californie, une étude montre l’implication de l’espèce Draeculacephala minerva comme vecteur de Xylella fastidiosa dans les cultures d’amandiers (Daane et al. 2011), et une autre montre que D. minerva est active dans les oliveraies (Krugner et al. 2014).
Comme décrit dans l’étude de Rosch et al. (2022), le groupe d’espèces producta circonscrit par Hamilton (1985) contient sept espèces étroitement apparentées : D. californica Davidson & Frazier, D. minerva Ball, D. paludosa Ball & China, D. portola Ball, D. producta Walker, D. robinsoni Hamilton et D. zeae Hamilton. Dans leur étude, ces mêmes auteurs rapportent la première détection non officielle d’individus du genre Draeculacephala en France et en Espagne, appartenant à l’espèce D. robinsoni Hamilton native et répandue en Amérique du Nord. La première détection a eu lieu en France en mai 2021 sur la commune de Banyuls-sur-Mer, dans les Pyrénées orientales. Suite à cette détection, une surveillance a été réalisée, notamment au niveau des rivières proches de l’estuaire où a eu lieu la première détection. En août 2021, l’espèce a été détectée en Espagne dans les zones humides de l’Empordà en Catalogne. Les lieux alentours ont été surveillés à l’aide d’un filet-fauchoir et des pièges collants ont été installés au niveau d’entreprises proches. Les échantillons ont été identifiés morphologiquement à l’aide de différentes clefs de référence.
L’insecte a été détecté au niveau de 11 sites différents, séparés de 86 km maximum (Argelès-sur-Mer en France et Lac de Sils en Espagne). L’espèce a été détectée au niveau de lits de rivières secs présentant une végétation rudéale importante, des prairies ou encore des pâturages régulièrement inondés. Les plantes hôtes potentielles en France présentes dans le lit de la rivière Ballaury où D. robinsoni a été capturée en premier, sont : Agrostis stolonifera L., Arundo donax L., Avena sterilis L., Cynodon dactylon (L.) Pers., Bromus catharticus Vahl, Paspalum distichum L., Polypogon viridis (Gouan) Breistr, Polypogon maritimus Willd. (Poacées), Cyperus esculentus L., Cyperus eragrostis Lam. et Scirpoides holoschoenus (L.) Soják (Cyperaceae).
En France, Paspalum disticum a été trouvé dans tous les sites où les nymphes ont pu être échantillonnées. Le développement larvaire est donc susceptible de se produire sur cette espèce de Poacées. A noter qu’en zone tempérée en Amérique du Nord, des individus de D. robinsoni peuvent être trouvés de mars à décembre avec un pic pendant les mois d’été, ce qui implique que l’hivernage se produit au stade de l’œuf. Les plantes hôtes enregistrées de D. robinsoni en Amérique du Nord sont principalement des graminées et des carex, y compris Elymus virginicus L., Leersia oryzoides (L.) Sw., Muhlenbergia glomerata (Willd.) Trin., Muhlenbergia frondosa (Poir.) Fernald, Echinochloa muricata (P. Beauv.) Fernald, Phalaris arundinacea L., Zea mays L., Saccharum sp. et Carex sp..
Sur la base de la proximité taxonomique des différentes espèces et de la capacité connue de D. minerva à être vecteur de X. fastidiosa, les auteurs recommandent de suivre de près la propagation de D. robinsoni.
Source : Lien
Europe, France
/ Multi-espèces / Article scientifique sur l’épidémie de Xylella
fastidiosa sur le territoire national
Une étude rapporte la détection et la caractérisation génétique de deux nouveaux variants de Xylella fastidiosa. En effet, l’analyse MLST (protocole OEPP PM7/24) de plus de 24 000 échantillons de plantes collectés dans la région PACA depuis 2015 a permis de mettre en évidence deux nouvelles séquences types (ST) qui viennent s’ajouter aux 87 décrites jusqu’à présent à travers le monde, et qui sont génétiquement associées à la sous-espèce multiplex. Il s’agit du variant ST 88 détecté dans le Var sur Polygala myrtifolia, Hebe sp., Osteospermum ecklonis, Lavandula x intermedia, Coronilla glauca et Euryops chrysanthemoides, et du variant ST89 détecté dans les Alpes-Maritimes sur Myoporum sp. et Viburnum tinus. ST88 est étroitement lié aux génotypes suivants : i) ST6 trouvé en France (Corse, PACA) et en Espagne continentale ; ii) ST7 trouvé en France (Corse, PACA), aux îles Baléares et au Portugal ; iii) ST81 trouvé aux îles Baléares ; et ST87 trouvé en Italie. Les génotypes ST88 et ST7 appartiennent au même complexe clonal et partagent probablement la même niche écologique car ils ont été retrouvés en co-infection. Le génotype ST89 quant à lui est étroitement lié à ST41 et ST43 trouvés aux États-Unis, ce qui suggère une introduction depuis l’Amérique du Nord.
En Occitanie (Aude), l’autre région française impactée par X. fastidiosa, l’analyse de 8 000 échantillons de plantes collectés entre 2020 et 2021 dans différents environnements, a permis de typer 98 échantillons multiplex ST6 à partir de 16 espèces de plantes dont une nouvelle espèce, Perovskia abrotanoides, qui était asymptomatique. Il s’agit de la première caractérisation du génotype ST6 pour cette région.
Source : Lien